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De l’autonomie des individus

Une société où tout le monde pourrait vivre dignement, sans assistanat ni paternalisme, est à portée de main.

– Gaspard Koenig et Marc de Basquiat, conclusion du rapport « LIBER, un revenu de liberté pour tous »

Ça alors ! La dignité pour tous, à portée de main ! Sans assistanat ni paternalisme, de surcroît ! L’autonomie, que dis-je, la liberté ! Où dois-je signer ?

Mais par méfiance, je vais malgré tout tenter de comprendre de quoi il s’agit. Le LIBER (« revenu de liberté pour tous » : quel magnifique slogan !) est un impôt négatif. J’ai déjà abordé la question du revenu de base (ou universel) et de sa conception sociale (qui signerait la fin du travail contraint).

A travers la vision de Koenig et de Basquiat, j’ouvre le versant soi-disant « libéral » du sujet – que je préfère qualifier, disons-le tout de suite, de pseudo-libéral de droite dure, caché derrière « les meilleures intentions du monde », cela va de soi !

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La très énorme supercherie du revenu universel

Franchement, en m’enquérant de la question de la pauvreté et du montant de revenu permettant de vivre décemment en France, je ne me doutais pas que j’allais lever un lièvre de cette ampleur. L’ignorance a ses vertus, et je découvre à la fois amusé et pétrifié d’effroi, comme Alice au pays des merveilles, le grand lapin blanc que voici : le revenu universel ! (et ses nombreuses autres appellations)

 

Alice Lapin Blanc
Ce lapin blanc ne cherchait pas l’heure, mais souhaitait fixer le montant d’un hypothétique revenu universel

 

Références et jalons

Mais commençons par le commencement, en posant quelques repères bienvenus – car on verra dans quel fatras on va rapidement se retrouver !

D’abord, qui sait quel revenu mensuel il faut pour vivre « décemment » en France ? L’ONPES (Observatoire National de la Pauvreté et de l’Exclusion Sociale) nous répond très précisément : de 1 424 € par mois pour une personne seule à 3 515 € par mois pour un couple avec deux enfants se logeant dans le parc privé.

Le document [rapport annuel de l’ONPES] révèle les conclusions d’une enquête menée depuis trois ans pour évaluer les «budgets de référence», nécessaires pour «une participation effective à la vie sociale». Cette étude s’inscrit dans une réflexion menée au niveau européen, visant à déterminer «un revenu minimum décent».

On lira l’article cité ci-dessus et le rapport de l’ONPES pour consulter les différentes demandes subjectives effectuées par les personnes interrogées par l’ONPES pour déterminer les « besoins » correspondant à cette « participation effective à la vie sociale », c’est-à-dire, en résumé, vivre relativement confortablement et profiter convenablement de ce qu’offre le niveau de vie en France. Le rapport indique notamment s’appuyer sur la méthode du consensus éclairé, c’est-à-dire de demander leur opinion aux principaux intéressés (les citoyens) plutôt que de concevoir un cadre théorique.

Voilà donc le niveau de revenu auquel le Français de 2015 prétend a minima : en dessous de celui-ci, il se trouverait par conséquent frustré car privé d’un certain nombre de possibilités offertes par la société contemporaine.

 

Autre mesure de la pauvreté, proposé cette fois dans le cadre de la politique de la Ville, en juin 2014, par le cabinet de Najat Vallaud-Belkacem (qui n’était pas encore Ministre de l’Education) :

Ont été retenues les zones où plus de la moitié de la population vit avec moins de 11 250 euros par an et par foyer, soit 60% du revenu médian national (avec une pondération selon le niveau de vie dans l’agglomération). Environ 1 300 quartiers de 700 communes seront désormais concernés.

[…]

Après un premier programme entamé en 2003 qui a concerné 500 quartiers et doté de 12 milliards d’euros de subventions, l’Etat doit lancer à l’automne un second programme avec 5 milliards de fonds publics. En bénéficieront 200 quartiers qui figurent sur la nouvelle carte de la pauvreté et qui présentent les « dysfonctionnements urbains les plus importants ».

Des zones composées de foyers qui gagnent en moyenne un peu moins de 1 000 € par mois sont considérées représenter des îlots de pauvreté pour lesquels doit être entamée une action prioritaire. Ce qui est cohérent avec l’estimation du seuil de pauvreté en France : 987 € en 2012. « En 2012, 13,9 % de la population française vit en dessous du seuil de pauvreté ».

 

Dernier jalon à fixer, celui de la richesse :

Pour nos concitoyens, le riche c’est celui qui gagne en gros deux à trois fois plus que celui qu’on interroge : 4500 euros pour les Français aux revenus les plus modestes (moins de 1 500 euros de revenus par mois), 5000 euros pour les 50% de Français aux revenus moyens (2 500 euros par mois) et 8 000 euros pour les 25% de Français gagnant plus de 3 500 euros par mois.

Point intéressant à noter, l’évolution de la perception de la richesse ces dernières années, selon Odoxa :

La richesse perçue est corrélée à son propre niveau de revenu et surtout a très nettement baissé depuis ces dernières années.

Alors que les Français interrogés en 2011 considéraient que l’on est « riche » à partir d’un revenu de 6000 euros par mois, ce seuil est tombé 4 ans plus tard à 5000 euros par mois. Pour le patrimoine on considérait que l’on était « riche » en 2011 à partir de 1.000.000 d’euros. 4 ans plus tard, ce niveau a été divisé par deux pour chuter à 500.000 euros aujourd’hui.

 

Partant donc de l’analyse statistique et de ce que les gens déclarent, nous allons maintenant entrer dans la sphère nébuleuse de ce que les idéologues décrètent. Attention, ça secoue ! Car j’ai l’impression que ce sujet à la mode accapare de nombreux sujets de thèses pour les doctorants-aspirants-chercheurs et agite un certain microcosme d’économistes et d’agitateurs d’idées qui pensent y trouver un véritable moyen de subsistance : le revenu universel est d’abord leur propre revenu !

 

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