Archives de catégorie : Spiritualité

Mes aïeux et mon pedigree

Comme j’ai critiqué les influences arbitraires qui gouvernent notre pensée et font de nous des héritiers plutôt que des discordants, il est donc honnête que je procède à l’élucidation de mon pedigree.

Je dois donc ouvrir la porte aux fantômes, à ces images et récits de ma jeunesse que je sais travailler pour toujours mon inconscient.

 

Je hais les voyages et les explorateurs.

– Claude Lévi-Strauss, incipit de Tristes Tropiques

 

 

Je vais vous parler de mes aïeux, qui ne furent ni des voyageurs, ni des explorateurs, mais qui vécurent cent vies chacun, en hommes d’action cosmopolites.

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Ce dont ils rêvent (et feraient mieux d’y réfléchir un peu plus !)

Je suis tombé sur un article véritablement atterrant, où l’on nous parle de « rêves » de politiciens.

Franchement, je ne croyais jamais dire ça, mais je préfère encore savoir ce qu’ils pensent quand ils sont en train de se raser que ce que leur inconscient nourrit. Sarkozy ne nous avait pas surpris quand, en 2003, il répond à Duhamel :

Au moins, lui est cohérent du matin ou coucher, et en dormant : la présidentielle, c’est en se rasant, en déjeunant, en enfilant son pyjama et en rêvant !

Ca peut sembler ridicule (et ça l’est, assurément), mais au moins on sait à quoi s’en tenir.

Rien n’est plus rassurant qu’un politicien qui rêve de devenir Président de la République.

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Le retour aux racines – quand on en a le choix !

Sylvain Tesson nous fait le coup du retour à la nature !

Dans un article paru dans le magazine Le Point du 28 mai (article en ligne ici), il vitupère contre un rapport sénatorial traitant de l’inégalité des territoires et notamment de l’hyper-ruralité :

Pour un cerveau techno, la « ruralité » n’est pas une vertu, mais une malédiction : le rapport déplore l’arriération de ces territoires qui échappent au numérique, sont mal desservis, pas assez urbanisés, privés de grands commerces, d’accès aux administrations. Ce que nous autres, pauvres cloches romantiques, tenons pour un luxe – le silence, l’ensauvagement, la préservation naturelle – est considéré dans ces pages comme une catégorie du sous-développement. […]

Le Wifi, l’asphalte, les centres commerciaux, les ronds-points et les zones d’activités ramèneront ces trous noirs dans la modernité heureuse !

 

Pour enfoncer le clou, il cite Cioran :

L’intérêt que le civilisé porte aux peuples dits arriérés est des plus suspects… La civilisation, son œuvre, sa folie, lui apparaît comme un châtiment qu’il s’est infligé et qu’il voudrait à son tour faire subir à ceux qui y ont échappé jusqu’ici.

mythe du bon sauvage
Sylvain Tesson en plein mythe du bon sauvage !

Or, ces propos constituent une critique très à charge et fallacieuse du rapport Hyper-Ruralité produit par un sénateur (comme quoi, rien n’est impossible !).

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Utopia

Finalement, nous prîmes la route du retour vers Utopia, capitale du royaume. Les détails de sa fondation restent obscurs. Dans l’antique bibliothèque d’Antioche, de vieux parchemins parlent d’une nouvelle Byzance érigée à l’Ouest de la Mer Intérieure par des esclaves affranchis de l’Empire romain.

Quand un étranger s’éblouit devant la magnificence actuelle de la cité, il n’est pas un Utopien pour lui rappeler qu’elle ne fût à l’origine qu’un campement de réfugiés venant de toutes les parties de l’Empire Romain décadent. Cette modestie n’est maintenant qu’une coquetterie superficielle, tant les contemporains, bercés dans la magnificence du glorieux empire, goûtent le luxe comme leur pain quotidien.

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Plasticité du cerveau

Étant donné que je ne suis ni neurochirurgien ni neurobiologiste, je ne vais pas m’étendre sur un éventuel état de l’art scientifique de cette discipline, mais j’aborderai ce sujet sous l’angle fondamental de la compréhension de notre subjectivité et de notre responsabilité en tant qu’individus capables de libre arbitre :

La plasticité neuronale

Cerveau
Cerveau en mouvement : tempête sous un crâne

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Ma conception de l’enseignement de l’acte de philosopher

Après avoir rédigé une critique de l’enseignement philosophique contemporain ici, voici ma définition de la philosophie et de ce que je considère être sa suprême utilité – dans le cadre subjectif de ce qui serait ma barbarie.

En préambule, il faut dire ceci : que le « programme » que j’envisage est irréalisable en une année d’enseignement. Il faudrait au moins compter trois années, avec des élèves pris à l’âge de 15 ans.

Ce que philosopher devrait être : une ouverture, un décrochage du temps présent, une sortie de soi-même et de la société, une aventure des possibles, des tentatives personnelles et globales. Car il me semble fondamental pour la construction de l’esprit d’innovation, d’éviter de laisser la jeunesse baigner dans sa marinade (celle dans laquelle on l’a plongée).

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Education : l’enseignement philosophique

Depuis les Grecs anciens jusqu’aux Lumières, la philosophie est la discipline qui englobe tout : elle est le questionnement, par l’usage de la raison, sur toute chose et tout mécanisme universel, naturel ou humain. Elle est autant observation attentive du monde qu’édification de principes et de systèmes. Elle conçoit et s’appuie sur des outils que sont les sciences et la logique. Pythagore, Thalès, Platon, Aristote, Descartes, Hobbes, Pascal, Newton, Galilée, De Vinci : autant d’exemples de penseurs globaux, de savants pour qui science et philosophie ne font qu’un. La position de la thèse de Husserl, dans La Krisis, est que

L’irruption de la philosophie, prise en ce sens où toutes les sciences y sont incluses, est le phénomène originaire de l’Europe spirituelle.

 

Ce n’est réellement qu’à partir du XIXe siècle, sous l’essor du positivisme et du scientisme, que les philosophes, les scientifiques, les économistes, les psychologues, les historiens, les physiciens, les mathématiciens, etc. deviendront des spécialistes de leur discipline, entraînant la disparition de l’honnête homme comme figure idéale du penseur.

Mais que nous enseigne-t-on au fond de cette « humanité » ? En classe de Terminale (et encore, uniquement pour le cursus du baccalauréat général en France, et de manière très minoritaire), nous avons plutôt droit à un bâclage monumental sous une forme qu’il faudrait qualifier d’ « histoire et exercices pratiques de philosophie ».

Ce qui aboutit à une conclusion que l’on entend régulièrement, reprise dans cet article par un enseignant de philosophie en classe de Terminale :

La philosophie ne sert à rien

Pour être franc, la réponse est simple : la philosophie ne sert à rien. Sa contribution au PIB national est nulle. Le discours philosophique s’attache en effet à des problèmes de toujours, qui ne seront jamais refermés. Il ne donne pas de solution, il ne produit pas de certitude, il ne pose pas de point final. Parce qu’elle est le lieu d’une recherche de la vérité.

 

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La condition de l’homme préhistorique contemporain

J’ai toujours le sentiment de tailler le biface dans la caverne.

 

Taille du biface
Taille du biface en sous-vêtements, par une chaude journée d’été

En quoi différons-nous de l’homme préhistorique ? Notre existence est-elle si différente ?
Nous avons ce fait nouveau, pour les plus chanceux d’entre nous : la certitude de notre subsistance, par l’octroi de droit d’un ensemble de moyens sécuritaires, alimentaires et médicaux garantis par la société dans laquelle nous vivons. Mais au profit de quoi, sinon ce profit lui-même ? Car on a fait société d’abord pour s’assurer de combler ces besoins primaires. Les projets idéologiques (« utopies » au sens commun, auquel je ne souscris pas) sont venus après, et il semble qu’ils ont tous mené à l’impasse en étant abandonnés ou trahis.

Un homme automatiquement nourri, soigné et protégé contre l’agression se retrouve face à lui-même, et ce face-à-face lui impose de se forger une colonne vertébrale idéologique, c’est-à-dire un socle de valeurs qui conditionne ses choix et son mode de vie, et institue les termes initiaux des rapports entretenus avec les individus qui ont souscrit à ce même socle idéologique.

Ce socle de valeurs évite de se sentir étranger partout, y compris à soi-même.

Mais, comme l’écrit La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire :

On ne regrette jamais ce qu’on n’a jamais eu. Le chagrin ne vient qu’après le plaisir et toujours, à la connaissance du malheur, se joint le souvenir de quelque joie passée. La nature de l’homme est d’être libre et de vouloir l’être, mais il prend facilement un autre pli lorsque l’éducation le lui donne.

Disons donc que, si toutes choses deviennent naturelles à l’homme lorsqu’il s’y habitue, seul reste dans sa nature celui qui ne désire que les choses simples et non altérées. Ainsi la première raison de la servitude volontaire, c’est l’habitude.

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Un monde sans dieux

Consciousness Began When the Gods Stopped Speaking

– Julian Jaynes, The Origin of Consciousness in the Breakdown of the Bicameral Mind

(ma traduction : la conscience est apparue lorsque les dieux se sont tus)

Un excellent article présente le travail de Julian Jaynes sur la notion de la conscience. Ce dernier prend l’exemple des grecs anciens, qui, comme le montre selon lui le récit de l’Illiade, étaient guidés par les voix des dieux qui leur conseillaient d’agir de telle ou telle manière. La disparition de ces voix divines serait pour lui l’origine de la conscience – la prise de conscience.

Si l’on étend cette idée, il faut comprendre que tout ce que l’on considère encore comme un dieu nous empêche d’accéder à la conscience des choses.

Or, les dieux aujourd’hui ne sont plus des entités éthérées prenant forme humaine (ou autre) à leur guise, et qui gouvernent les forces de la nature : ceux-ci nous paraissent folkloriques.

L'Enlèvement d'Europe, par Noël Nicolas Coypel
L’Enlèvement d’Europe, par Noël Nicolas Coypel

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Raisonnement porcin

Si nous devons tous aller à l’abattoir, autant profiter du temps qu’il nous reste

C’est ce que doivent se dire les porcs dans leur porcherie, eux qui se gavent de tout ce qu’ils peuvent dénicher.

C’est aussi à cette bassesse, résumée de manière à peine caricaturale, que le matérialiste-relativiste-ENUC asservit son existence. Il passe son temps à calculer comment atteindre le moindre mal, ou obtenir le bien le plus facile : c’est une économie de la vie. De petits calculs en petits calculs, il construit un monde aigri et rapetissé. Il se fait dévot de l’utilitarisme, en considérant que :

Le but et la dignité d’une vie humaine c’est de se consumer dans l’agencement des moyens.

– Sartre, Qu’est-ce que la littérature ?

 

Cependant, les porcs, comme les ENUCs, ont tort.

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